"Entravé de partout le jeune cheval roule à terre... On le relève à grand renfort de coups, on l'attache à un poteau jusqu'au jour suivant. Il s'irrite, se blesse, qu'importe". Ainsi décrivait en 1888 le naturaliste Grasset d'Orcet dans son livre "Cheval en Amérique" le débourrage martyr des jeunes chevaux. Ces procédés sont encore appliqués en Amérique du Sud, à peine adoucis. C'est devant cette barbarie que de jeunes cavaliers américains réagirent et qu'ils méritent depuis le titre de "nouveaux maîtres".
En Europe, de tout temps, sévirent des cavaliers margi-naux, brutaux jusqu'à la férocité tant par inculture que par stupidité. L'aspirant cavalier sérieux bénéficiait pourtant dès le IVe siècle avant J.-C. des principes fondamentaux de Xénophon : "Lorsqu'il s'effraie, c'est en le caressant et non en le brutalisant qu'on lui apprend qu'il n'a rien à craindre". Au XVIème siècle, les maîtres classiques prôneront les moyens les plus naturels de Pluvinel, La Guérinière à l'Hotte et Oliveira. Il est satisfaisant de constater que la férocité primitive a suscité chez quelques cavaliers du Nouveau Monde des réactions sensibles et ration- nelles. En 1814, l'Américain J. Powell écrit un "Art de-dresser les chevaux sauvages" qui n'a rien à envier aux éthologistes modernes. En 1856, un jeune pionnier de l'Ohio, John Rarey, publiera "L'art de dominer les chevaux", après avoir démontré son talent pour réduire de véri- tables fauves à l'état de montures dociles. Son principe était: "Faisons-nous respecter, comprendre et aimer". Ses moyens : la parole, la douceur et la manipulation physique.
Ces "anciens maîtres" américains sont les inspirateurs des "nouveaux" : les Tom Dorrance, Ray Hunt, Monty Roberts, John Lyons et Pat Parelli. L'aspect merveilleux de cette lignée d'hommes de chevaux, c'est qu'elle a réussi un retour spon-tané à la pensée et au langage humaniste des Xénophon et des La Broue alors qu'elle était isolée et séparée de ses racines culturelles.