La discipline du dressage, dans son acception classique, est la science des exercices du corps, de ses assouplissements, de son équilibre, réglée par un sens presque musical du rythme et de la mesure.
La finalité du dressage ne consiste pas seulement dans la présentation des chevaux aux airs de la haute école, mais aussi dans la réalisation aisée des disciplines auxquelles le cheval est destiné. Le rassembler qui caractérise le dressage abouti et qui est l'état de concentration des forces du cheval, concerne aussi bien le cheval d'obstacle que le cheval d'école. En un mot, le dressage est - ou devrait être - le tronc commun de toutes les disciplines équestres montées et attelées. Pour prétendre à ce rôle, il ne peut s'agir que du dressage conçu et exécuté selon la philosophie et les critères de l'équitation classique de tradition française, c'est-à-dire "léger dans la parfaite harmonie du jeu de ses forces, ajusté à son objet dans la légèreté" (Decarpentry). L'aboutissement d'un dressage réussi est l'état d'équilibre supérieur réalisé par la flexion des hanches provoquant l'allégement du devant et servant de ressort à la masse.
Ce raccourcissement des bases de sustentation assure la mobilité en tous sens, les transitions harmonieuses et le relèvement brillant des gestes du cheval d'école, mais développe aussi le confort et la sécurité du cheval d'extérieur et les moyens du cheval d'obstacle.
Le dressage est Le "tronc commun"
de toutes Les disciplines équestres.
Le sport est la pratique méthodique des exercices physiques en vue d'augmenter la force, l'adresse et la beauté du corps. Le cavalier qui débourre son jeune cheval, qui l'initie aux premiers mouvements, partage avec son cheval l'acte sportif. Ce n'est encore ni un jeu ni un spectacle pas plus qu'une recherche de prouesses ou de performances, mais déjà le culte de l'effort intensif appuyé sur le désir de progrès. La progression va se dérouler suivant la "trilogie" de l'Hotte : "Calme, en avant et droit" auquel j'ajouterai "cadencé". Ces objectifs vont s'exprimer sur des lignes droites et courbes, dans des actions longitudinales et latérales, Les moyens qu'il faut travailler, d'abord isolément puis ultérieurement fusionnés, sont :
C'est du juste assemblage d'une méthodologie fine
et du talent de l'écuyer que naît émotion artistique.
Le dépassement du geste purement sportif s'exprime par des allures et des aides qui surpassent ceux que le cheval donne en liberté. L'exécution équestre devient comparable à celle de la danse ou de la musique : elle disparaît dès qu'elle s'accomplit. Elle tire sa grandeur de l'effacement de l'écuyer, du petit nombre de moyens mis en oeuvre et de leur simplicité. Il n'agit plus que par touches et nuances qui créent la communication indescriptible qui s'instaure entre les partenaires. L'art naît ici, le cheval est l'artiste, le cavalier son chorégraphe. L'idéal artistique étant situé, les critères de jugement sont, comme pour tout autre spectacle : le respect des règles classiques prescrites, de la Guérinière au général l'Hotte, et mises en forme par le général Decarpentry dans le règlement de la FEI (Fédération équestre internationale). C'est du juste assemblage d'une méthodologie fine et du talent de l'écuyer que naîtra l'émotion artistique. Les trois Académies mondiales où s'exprime encore l'Art équestre sont les écoles de Vienne, de Jerez et de Lisbonne.
Le dépassement du geste purement sportif s'exprime par
des allures qui surpassent celles que le cheval donne en liberté.
L'équitation de dressage a donné lieu à compétition pour la première fois en 1929, lorsque les différentes Fédérations nationales décidèrent de s'affronter sur un programme précis, limité dans le temps, fixé dans les figures, leurs enchaînements, jusqu'au nombre de foulées. On espérait de cette réglementation de l'art son épanouissement. Il n'en a pas toujours été ainsi.
L'art s'accommode mal de la compétition lorsqu'elle devient un mode d'expression unique et permanent. écuyer et chevaux travaillant sur une succession de programmes impératifs tombèrent souvent dans une mécanisation contrainte au détriment de la grâce et du brillant. Dans les années soixante, l'altération était si grande que la Fédération internationale envisagea la suppression du piaffer et du passage de la reprise olympique plutôt que d'admettre les exécutions atrophiées que l'on y voyait.
Parce que des voix se sont élevées pour un autre dressage, parce que quelques chroniqueurs ont soulevé la question et enfin parce que des cavaliers internationaux ont montré qu'une épreuve de compétition pouvait ne pas être l'écrasement d'un noble partenaire au nom de la sécurité d'un exercice, les concours sont devenus partiellement plus acceptables et utiles pour que chacun puisse se mesurer d'une part et trouver dans les protocoles des juges compétents la révélation de ses faiblesses et de celles de son cheval. Beaucoup reste cependant à faire de la part des jurys, des critiques et des entraîneurs pour que soit enfin appliqué le remarquable règlement de la FEI qui de l'article 401, son introduction, à l'article 418 est un hymne à "l'harmonie, la légèreté et l'aisance des mouvements ( ... ) la légèreté de l'avant-main ( ... ) le léger et moelleux contact ( ... ) la mise en main moelleuse", etc. C'est par le respect des recommandations des pères fondateurs que sera enfin atteint leur objectif en compétition : "Faire fleurir la poésie de l'équitation", comme le rappellent le général Decarpentry et le général von Holzing, rédacteurs du règlement FEI.
Michel Henriquet Octobre 2003